Pour la sortie de Ridge Racer Slipstream, nous avons pu nous entretenir avec Alexandre Adjadj, Responsable de la stratégie mobile - Ventes et Marketing, de Namco Bandai Europe. Avec lui, nous avons justement fait le point sur ce nouvel épisode avant sa sortie sur iOS et Android, mais également sur la politique de l’éditeur japonais vis-à-vis du mobile.

Pocket Gamer France : Cette année, Ridge Racer fête ses 20 ans au Japon, pourquoi avoir choisi de sortir un nouvel épisode sur smartphone et pas sur les plateformes traditionnelles ?
Alexandre Adjadj :
C’est une bonne question, mais c’est une question récurrente. Il semble que les médias sont très curieux de comprendre pourquoi on fait un jeu d’abord sur mobile et pas sur les nouvelles plateformes. Le jeu a été fait par le bureau américain, et il n’a pas le contrôle sur la franchise et sur les investissements. Ce sont nos bureaux à Tokyo qui décide de la stratégie globale. C’est surtout pour une raison économique, car le nombre de plateformes est plus élevé. Splitstream n’est pas lié à la décision de ne pas proposer un jeu sur les consoles traditionnelles.

La façon de penser chez Namco Bandai est en train de changer, il y a une prise de décisions beaucoup plus importante de la part des autres studios, autre que les bureaux principaux au Japon. Dans le cas de Ridge Racer Slipstream, on a été voir la maison mère pour leur proposer le projet, et ça n’a eu aucune incidence sur les potentiels projets sur les plateformes traditionnelles

Ce n’est pas la première fois que la saga débarque sur iPhone et iPad (avec Ridge Racer Accelerated), qu’est-ce qui a changé depuis la sortie du dernier épisode en 2009 ?
AA :
Il y a toujours une question d’opportunité commerciale, il y a toujours des gens qui aiment les jeux de racing. Accelerated a été développé par une équipe au Japon, donc il y a une façon de penser qui est différente. On a pris comme base de départ le premier épisode sur PSP et l’avons amené sur mobile. On a ensuite adapté la partie économique. On n’a pas la même approche que l’épisode Vita. On voulait faire un vrai jeu, dédié aux plateformes mobiles.

Il s’agit d’un jeu premium à 2,79€ sur iOS avec la possibilité de débloquer plus de voitures et d’améliorations avec des micro-transactions. On s’est dit qu’il y avait une belle opportunité pour offrir aux joueurs un contenu complet sans pour autant les obliger à forcément dépenser de l’argent. Et si on était sûr que les fans apprécieraient l’expérience, on voulait aussi que le jeu plaise à n’importe qui. La version Android sera en revanche free-to-play avec une approche un petit peu plus différente, car le public est différent, il y a une certaine fragmentation et du piratage plus présent.

Cette année, il y a eu énormément de challengers, on a eu Real Racing 3, 2K Drive et aussi Asphalt 8, comment Ridge Racer Slipstream peut-il réussir à se démarquer ? Quels sont ses atouts ?
AA :
Ce n’est pas la même expérience. Asphalt 8, ils tentent de tout mettre dedans. Il y a du Need for Speed, du Burnout et du Ridge Racer dans le même package, sans réussir à convaincre à 100% sur chacun de ces aspects. Il y a des gens qui aiment ça, mais l’expérience Ridge Racer, ce n’est pas ça. Il y a des dérapages. Les performances jouent beaucoup là-dessus. Il y a aussi un vrai aspect communautaire. Même si Gameloft fait évidemment de l’excellent travail depuis quelques années, quand on regarde le top des jeux rentables, Asphalt 8 n’y est pas.

Vous êtes aussi un éditeur sur iOS et Android. Récemment, vous avez sorti Rakoo’s Adventure]] et [[Gregg, deux jeux français. Comment trouvez-vous ces talents ? Le fait que ce soit à chaque fois des développeurs français, c’est dû au hasard ?
AA :
Il y a un esprit de proximité, car les jeux cités sont localisés en France, mais on a quand même une approche plus globale. On en trouve dans tous les pays. Il y a encore 18 mois, la plupart des petits développeurs étaient très fiers, à une époque où les applications étaient bien moins nombreuses qu’aujourd’hui, et donc forcément plus de possibilité de visibilité. Aujourd’hui, il y a des centaines de jeux qui sortent par semaine, et quand on a pas l’argent pour le côté marketing ou pour développer un vrai jeu, tu es obligé d’avoir des partenariats avec les éditeurs.

Il y a 18 mois, il y avait des éditeurs comme Chillingo qui faisait des promesses inconsidérées aux développeurs qui étaient alors séduits par l’argent. Aujourd’hui les mentalités ont évolué et les développeurs sont séduits par notre puissance marketing. La période de grâce entre 2008 et 2011 où tous les développeurs étaient poussés par Apple pour communiquer sur leur succès personnel est terminée.

Entre septembre et décembre, Namco a proposé sur l’App Store et Google Play (japonais) plusieurs épisodes de la série Tales of, y-a-t-il une chance pour que l’on en profite en occident dans des versions localisées ?
AA :
Tales of Phantasia, c’est certain, mais pour le reste, je ne peux pas le certifier, ça dépendra du succès du premier épisode que l’on sortira en occident dans quelques semaines. Mais il y a une organisation très spécifique.

Quel bilan tirez-vous de ces 5 ans de l’App Store ?
AA :
Je pense qu’en 5 ans, l’impact du mobile dans le jeu vidéo a changé l’industrie. Le mobile avant Apple, c’était petit, c’était Java, c’est des petits jeux comme Tetris. En 5 ans, il y a eu un changement radical. C’est une évolution naturelle, avec des résolutions de plus en plus grandes, et une puissance qui augmente, forcément que l’on va jouer plus sur un appareil mobile que l’on va pouvoir transporter. C’est tellement plus simple. Est-ce que ça a changé le jeu vidéo de la bonne façon ? On verra dans 1 an, ou dans 10 ans. Quand je parle à des mères de famille qui me disent que la manette d’une console est trop grosse et qu’ils préfèrent jouer sur mobile, c’est un signe. Le coût des jeux mobiles montre aussi les problèmes qu’il peut y avoir avec l’achat d’un jeu ou d’une console traditionnelle. Les habitudes de consommations sont en train de changer.

Merci.