Terry Cavanagh est un développeur irlandais indépendant qui s'est surtout fait connaitre pour son titre de plateforme hardcore, VVVVVV. Pourtant, avant celui-ci, il avait déjà réalisé un autre jeu tout aussi marquant, qui avait enchanté la communauté des joueurs web par son univers prenant et son gameplay exigeant. Ce titre s'appelle Don't Look Back et débarque sur Google Play quelques jours après l'annonce d'un probable portage de VVVVVV.

Une narration invisible

La première chose qui surprend dans Don't Look Back c'est son univers. Graphiquement désuet, on ne s'attend pas un instant à l'aventure prenante et originale que l'on va vivre. Pourtant il faut reconnaitre que Terry a su rendre ses petits amas de pixels (tout droit sorti de l'aire Atari 2600), particulièrement vivant. On découvre avec beaucoup d'émotion notre personnage devant une tombe balayée par le vent et la pluie. Un point de départ étonnant qui se passe pourtant de tout autre élément narratif. Pas de texte, pas de dialogues, aucune autre information que cette simple image comme point d'origine de l'aventure. On débute alors le jeu sans rien connaitre de ses mécanismes ni de son scénario en faisant la seule chose que l'on peut faire, avancer vers la droite. On passe alors plusieurs écrans qui nous permettent de nous familiariser avec les commandes très simples du titre. Sans doutes la meilleure des manières d'amener un tutoriel, puisqu'il n'est ni intrusif ni véritablement perceptible. On notera au passage que dans sa façon de raconter son histoire et de pousser le joueur à découvrir les mécaniques du jeu, Don't Look Back fait immanquablement penser à Another World. Petit clin d’œil évident, on récupère notre arme de la même manière en la ramassant simplement sur le sol (idem que dans Flashback).

Apprentissage par l’erreur

Le gameplay de Don't Look Back est aussi épuré que son graphisme. Deux boutons servent à déplacer le personnage sur la droite et la gauche de l’écran et deux autres permettent de tirer et sauter. Aucune barre de vie ni compteur de score ou de munition. On touche un obstacle ou un ennemi et l’on perd. C’est aussi simple que cela et pourtant plus élaboré que l’on pourrait le croire. En effet, le level design est particulièrement tordu et chaque écran que l’on passe nous positionne face à un mini puzzle de réflexe et de stratégie. S’il l’on peut parfois se contenter de sauter au millimètre en usant habillement de dextérité pour éviter les ennemis, il faudra bien souvent s’y reprendre à plusieurs fois avant de comprendre le cheminement à effectuer. Certains passages demandent en effet un timing précis et des actions dans un ordre définis. On pense notamment aux plateformes qui apparaissent et disparaissent en rythme et qui demandent d’anticiper leur apparition en sautant dans le vide. Tordu et parfois frustrant mais toujours parfaitement maitrisé en terme de progression et de level design. Il faudra toutefois reconnaitre que le gameplay de type "die and retry", ne conviendra pas à tout le monde. Cependant dans l’ensemble on ne reste jamais bloqué bien longtemps et les points de sauvegarde sont si fréquents que l’on ne perd pas plus de quelques secondes à chaque fois.

Du mythe au jeu

Les plus cultivés auront tout de suite remarqué la filiation directe entre Don't Look Back et le mythe d’Orphée. Difficile de ne pas spoiler tant le jeu est court et son rythme soutenue, mais on s’aperçoit très vite, au fil de la progression, de la descente aux enfers de notre petit personnage. Les décors semblent plus torturés et sombres et les rencontres avec les boss ne laissent aucun doutes possible. Le premier fera immanquablement penser au cerbère, quant au dernier … Mais en dire plus serait gâcher tout le plaisir. Un plaisir d’ailleurs très court puisqu’il ne faudra pas plus d’une quinzaine de minutes pour en voir le bout. Une durée de vie ridicule souffrant d’une replay value tout aussi faible. Une fois terminé, on n’y rejouera pas. Il aurait put être judicieux d’intégrer des achievements, ou un système de statistiques indiquant le meilleur temps ou le nombre de morts. Malheureusement rien de tout cela n’est intégré. Rappelons toutefois que le jeu est intégralement gratuit et sans achats in-app. Difficile dans ces conditions de faire la fine bouche et de passer à coté de ce titre mythique.