En compagnie de Julia Lebedeva, Business Development Director chez Nevosoft, et pour notre nouvelle rubrique, nous avons voulu nous intéresser à la Russie, un pays où l’avenir du jeu vidéo mobile se joue. Lorsque l’on parle du jeu vidéo sur mobile, plusieurs pays se démarquent : le Japon est ainsi tout puissant, suivi évidemment des États-Unis, puis de la Corée du Sud et la Chine. La France est quant à elle le 9ème pays en termes de revenu par application (source : App Annie). Mais il y a un pays qui fait encore office de nain économique dans ce milieu pourtant si prolifique. Nous avons donc voulu en savoir un peu plus sur les techniques à adopter pour percer dans la glorieuse Russie en tant que développeur.

Le mystérieux joueur russe

Dans les années à venir, la Russie va sans doute devenir l’un des pays qui va le plus compter dans le domaine du jeu sur mobile. Mais avant que cela n’arrive, il va falloir réapprendre la façon de communiquer avec les joueurs qui s’y trouvent : les Russes. Ils n’ont pas leur pareil, et doivent donc être pris avec des pincettes, tout en prenant soin de respecter quelques règles. La première, c’est que la plupart des joueurs ne parlent que russe. Il faut donc adapter son application et la faire traduire, la seconde, c’est qu’il adore se plaindre, et demande surtout un support client disponible plus souvent possible, voir 24h sur 24h et 7 jours sur 7. La troisième, c’est qu’ils ne font pas confiance en ceux qui leur réclament de l’argent, si bien que la quatrième fait sens : ils regardent systématiquement les commentaires des autres utilisateurs. L’idée de proposer des clones en pagaille a forcément un impact sur les critiques d’une fiche App Store ou Google Play. Et si un joueur russe refuse de passer à la caisse, c’est en majeure partie à cause des défauts de votre application.

La localisation comme un pro

Pire encore, au-delà des défauts du gameplay, c’est surtout l’interface qui est importante dans un jeu. Car traduire un jeu en russe n’est en soit pas quelque chose de très difficile, l’adaptation en revanche, l’est beaucoup plus. En clair, le « Mode Gratuit » d’un jeu tiendra sur une ligne en français, alors qu’en russe, on se retrouve devant pas mal de lettres : Свободный режим (prononcez « Svobodnyy rezhim »). Certes, une simple erreur de traduction peut vous coûter des points, mais un bouton mal adapté à la langue qui fait dépasser grossièrement un terme faute de place à un effet répulsif. Qui plus est, ce n’est pas de la traduction au sens propre du terme. Le piratage étant légion dans cette partie du monde, il est vivement conseillé de partir sur un modèle économique free-to-play (ou freemium). Quitte à repenser ce modèle uniquement pour la Russie, en conservant une approche premium sur les autres marchés. L’approche la plus utilisée par les éditeurs d’Europe de l’Est, comme G5 Entertainment ou Nevosoft, s’avère être celle de la démo d’une petite heure (ou s’arrêtant après la première zone), pour ensuite demander au joueur de payer une certaine somme pour débloquer toute l’aventure, mais les achats in-app pour les jeux de gestions fonctionnent aussi très bien. Il ne faut pas non plus se contenter des stores officiels. Sur Android, il est nécessaire, si ce n’est même obligatoire, de partir vers d’autres cieux, comme notamment Yandex Store, qui dispose de sa propre application, à l’instar de l'App Shop d'Amazon, et d’un catalogue de 100 000 applications.

La Russie est un pays à part entière, où le sujet de l’argent et ce qui en résulte est encore tabou. On pardonne difficilement les écarts économiques, tandis qu’un jeu payant, même complet et sans achats in-app, n’arrivera pas à percer dans les charts. C’est encore un marché qui manque de maturité, mais qu’il faut néanmoins cajoler. Notre focus sur le jeu vidéo mobile en Russie s’achève ici. Dans les prochaines semaines, nous nous intéresserons à l’Amérique du Sud.