En déplacement à Paris dans le cadre de l’évènement Tokyo Crazy Kawaii, Karou Tsuchiya s’est entretenu avec nous pour faire le bilan du développement de Go Dance, l’une des dernières sorties de Sega sur plateformes mobiles. Avec lui, il a surtout été question de son jeu de danse, mais aussi de la politique de Sega vis-à-vis des smartphones et des tablettes mobiles. Enfin, nous avons brièvement discuté de l’avenir des consoles low-cost comme la OUYA. Pocket Gamer France : Tout récemment, vous avez lancé Go Dance, un jeu de danse mobile. Ce n’est pas forcément très commun, s’en est donc terminé des portages de jeux Dreamcast ?
Karou Tsuchiya :
Non, car il n’y a aucun lien entre les deux. Il faut bien se dire que ce sont deux marchés différents, et on profite toujours des nouveaux devices pour faire ressortir la fibre nostalgique des fans grâce à des portages de nos anciennes productions.

Quels ont été les principaux obstacles que vous avez rencontrés dans le cadre du développement de Go Dance ?
KT :
Il faut une équipe extrêmement performante avec les mêmes gouts, les mêmes tendances, qui soit finalement dans le même délire pour proposer un produit qui soit bon. Ensuite, il faut vraiment qu’on soit uni. Il y a une sorte de période de formation où chacun va être éduqué en vue de faire un jeu en commun. En termes de développement, ce sont des gens avec qui on s’attache, donc il y a forcément des difficultés et des conflits. Le but est que cela ne se ressente pas dans le développement, il y a un équilibre à trouver. En tant que producteur, je ne dois ainsi pas me laisser faire sous prétexte que c’est avec un ami que cela se passe mal, il y a toujours une hiérarchie à respecter. Comment adapter la technologie utilisée (Extreme Reality) à l’iPad afin que la caméra frontale, forcément moins bonne que celle à l’arrière, puisse reconnaître une personne ?
KT :
En fait, ce n’est pas tellement une difficulté, mais un avantage. La caméra est plus raide et permet d’analyser les données plus rapidement. Il faut juste opérer un switch dans esprit et tirer parti des défauts du capteur pour les rendre avantageux. En revanche, le vrai problème fut la rapidité du processeur, il faut donc un iPad ou un iPhone récent pour faire tourner Go Dance. Comment avez-vous choisi le catalogue musical de la version occidentale, et comment se déroulent les négociations avec les maisons de disque ?
KT :
Concernant la façon dont nous les avons choisis, nous avons voulu des titres internationaux, très pop. On a multiplié les genres avec une seule condition : qu’ils soient faits pour que l’on puisse danser facilement dessus. Pour les négociations, ce fut en revanche plus difficile. On a eu la chance d’avoir une agence avec qui Sega a déjà travaillé par le passé, mais malgré, les débuts ont été laborieux avec un, deux titres, mais une fois que les majors ont vu le jeu, ils ont été plus nombreux à nous faire confiance. Pourquoi ne pas avoir proposé d’utiliser sa propre bibliothèque musicale ?
KT :
Pour une chose : les chorégraphies. On a surtout voulu mettre l’accent sur la qualité des chorégraphies et leur coordination avec les musiques que nous proposons dans Go Dance. L’utilisation de sa propre bibliothèque musicale ne rendait pas ce genre de chose possible. Pour le jeu, nous avons travaillé avec des chorégraphes compétents et on a voulu que les gens prennent du plaisir. À l’époque de la sortie de Kingdom Conquest II, nous avions interviewé Ethan Einhorn de Sega of America qui nous confiait alors que les plateformes mobiles avaient permis à votre société d’évoluer et de prendre plus de risque en lançant des projets qui n’avaient pas forcément leur place sur les plateformes traditionnelles. Pensez-vous malgré tout qu’il soit possible de proposer une expérience sur les smartphones et tablettes similaires à ce que l’on peut trouver sur une licence comme Just Dance d’Ubisoft ?
KT :
Je connais Ethan, j’ai discuté avec lui de nombreuses fois au sujet de Go Dance, mais ma position vis-à-vis de ça, c’est que lorsque l’on s’est lancé dans le développement de Go Dance, on ne s’est pas préoccupé de ce que proposait les autres éditeurs. On voulait proposer sur des smartphones et des tablettes une expérience utilisateur de qualité, plus riche. Notre but, c’est de proposer du contenu plus fun, plus riche, pas de rivaliser avec d’autres, je n’y ai jamais pensé. Par exemple, quand on voit des applications comme Evernote ou Instagram, ça rend la vie plus utile et plus riche, et mon but avec Go Dance, c’est d’arriver à ça. Ce n’est pas une question de copier le marché traditionnel.

Il y a quelques jours, nous avons interrogé Junichi Masuda de Game Freak qui nous disait qu’il était inconcevable pour lui de proposer un jeu avec des achats in-app et qu’il serait gêné à l’idée de prêter son smartphone à ses enfants pour qu’ils puissent jouer dessus. Go dance étant un jeu avec des micro-transactions, qu’est-ce que vous pouvez répondre aux personnes peu confiantes à ce sujet ?
KT :
Il y a différents types de contenu téléchargeable. On a tendance à avoir peur, car certaines iApps font dépenser toujours plus d’argent. Nous, ce n’est pas le même système, ce n’est pas un jeu freemium mais premium. C’est vraiment du contenu additionnel, ce n’est pas une loterie. Le prix est aussi très accessible puisque chaque titre supplémentaire coûte 0,89€. C’est un prix raisonnable qui vous permet d’écouter de la musique tout en y jouant. Cependant, je ne dénigre pas les freemium et leurs iApps, mais il y a un problème de communication la plupart du temps qui engendre la méfiance. Si les éditeurs informent correctement les joueurs, ils ne verront plus les achats in-app comme du vol. Est-ce que l’on peut espérer un Go Dance « All-Stars » avec des personnages venant d’autres licences de Sega ?
KT :
(rire) Ca n’irait pas avec les personnages que l’on a modélisés dans le jeu, mais ce serait une bonne idée pour les incorporer en tant que danseurs secondaires par exemple. Pensez-vous qu’il soit possible de porter un jeu comme Go Dance sur des consoles comme la OUYA ?
KT :
Je ne connais pas très bien le produit ni leur politique, mais la première chose qui me vient à l’esprit, c’est que nous ne parlons pas au même public. Car sur iPad ou iPhone, les gens ont déjà les devices, ils n’ont donc pas besoin d’acheter une autre machine pour en profiter et plus généralement, quelqu’un qui va être intéressé par une OUYA possède déjà un smartphone ou une tablette susceptible de faire tourner Go Dance. Ça n’a donc pas vraiment d’intérêt. Une dernière question concernant l’avenir : après Go Dance, il va y avoir des ajouts de contenu, mais c’est aussi la porte ouverte aux suites… ou à d’autres genres que l’on n’a pas forcément encore vu sur l’App Store…
KT :
pour tout vous dire, je veux me concentrer sur Go Dance pour le moment, car d’ici la fin de l’année, nous prévoyons de rajouter une trentaine de musiques/chorégraphies au catalogue. Ensuite, on n’adaptera le jeu en fonction des retours, car nous sommes très attentifs.

Merci.

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