À l’occasion de la sortie de Soldats Inconnus : Mémoires de la Grande Guerre sur iPhone et iPad, Paul Tumelaire, le créateur du jeu basé à Ubisoft Montpellier, a bien voulu répondre à nos questions. Dans cet entretien, nous avons voulu en savoir un peu plus sur le développement du jeu, ainsi que plus spécifiquement sur la réalisation de la version tactile. Vous pouvez lire notre test du jeu à cette adresse et découvrir notre First Play. PocketGamer.fr : L’aventure de Soldats Inconnus n’est pas de tout repos, puisqu’après avoir été mis de côté au profit des Rayman, il est finalement réapparu, d’abord sur consoles et PC, puis aujourd’hui sur iOS, pouvez-vous nous expliquer comment s’est justement déroulé ce développement ?
Paul Tumelaire :
Exactement ! C’est une aventure très mouvementée et pleine de rebondissements. Au départ utilisée comme démonstration pour illustrer les capacités du moteur de jeu Ubiart Framework,  l’univers de Soldats Inconnus a très vite conquis les cœurs et enthousiasmé les développeurs d’Ubisoft Montpellier dès les premiers jours. Il nous a semblé très important de le faire aboutir, ne serait-ce que pour les valeurs très fortes que sont la fraternité, le dévouement véhiculé par son histoire et aussi l’envie de montrer le conflit de 14-18 sous un angle très rarement proposé dans le jeu vidéo. Nous avons formé une petite équipe d’une dizaine de personnes pour commencer à construire cette aventure puis d’environs de 40 personnes au cours des 3 derniers mois de développement. Vous avez évoqué dans de précédentes interviews votre passion pour la Première Guerre Mondiale. Comment est née cette passion, et surtout, comment expliquez-vous que ce conflit fascine moins que celui de la Seconde Guerre Mondiale par exemple ?
J’ai toujours été un passionné d’histoire et ce conflit peu connu m’a semblé très intéressant à découvrir et faire découvrir. Il parle d’une transformation de l’homme et de notre société, a une époque où personne ne s’attendait à ce que serait cette guerre moderne portée par l’industrie. Le fait qu’elle se soit déroulée il y a 100 ans l’éloigne davantage de nous que la Seconde Guerre mondiale ? Nous espérons que notre travail donnera l’envie de faire découvrir cette période de notre histoire. Visuellement, Soldats Inconnus ressemble davantage à une bande dessinée qu’à Rayman Legends, alors même qu’ils sont basés sur le même moteur (l’UbiFramework), comment expliquez-vous cette différence, et surtout, quelle influence a eu ce moteur sur le développement du jeu ?
C’est la force de ce moteur, nous permettre de réaliser des choses aux visuels très différents. En plus de permettre d’exprimer sa créativité, il nous permet de travailler très vite et facilement, avec peu de moyens humains, c’est pour cela que j’ai pu prendre en charge toute la production graphique, la création de personnages, et l’environnement du jeu.

Dans Soldats Inconnus, on incarne aussi bien un allemand, un français, ou encore un américain et une belge. C’était une volonté de ne pas porter la responsabilité du conflit et des événements qui en découlent sur les épaules de l’un des belligérants ?
Oui, l’idée principale était de montrer que les « ennemis » que nous avions en face de nous pendant le conflit n’étaient pas forcement les méchants de l’histoire. Il nous semblait très important de montrer qu’ils étaient tous des citoyens normaux jetés dans cette guerre dont ils ne comprenaient pas les enjeux réels. Les vrais belligérants n’étaient pas le peuple. Soldats Inconnus est un jeu pédagogique avec plusieurs informations à débloquer et réaliser en partenariat avec la Mission du Centenaire, comment s’est déroulé votre collaboration, est à quel point le jeu va être utilisé par l’État par exemple ?
Il nous a semblé très important d’aller au bout de notre envie de parler de cette guerre et des personnes qui y ont pris part, c’est pour cela que la rencontre avec la Mission du Centenaire, notamment Alexandre Lafon, historien et conseiller pédagogique pour la Mission du Centenaire a été pour nous un aboutissement. La Mission Centenaire nous a permis de valider la cohérence historique du projet et d’ancrer encore plus notre jeu dans la réalité. Cette coopération s’est traduite concrètement par la validation des faits historiques présents dans le jeu ainsi que la rédaction conjointe de l’encyclopédie intégrée. Nous souhaitons vivement que ce jeu puisse servir aux jeunes générations afin d’en apprendre plus sur la Grande Guerre, de manière didactique et distrayante, pourquoi pas dans les salles de classe. Dans le jeu, on fait la rencontre de Walt, un petit chien qui va être décisif pour remplir certains puzzles. Comment s’est déroulé le développement de ce personnage à part entière, et comment expliquez-vous qu’il suscite autant de sympathie ?
Walt est apparu naturellement en regardant des dizaines de vidéos et centaines de photos de la Grande Guerre. Les soldats de tout bord étaient entourés d’animaux, ils partageaient leur quotidien sur le terrain avec eux. L’image première que l’on a du chien est celle du meilleur ami de l’homme et comme je savais ce que nos héros allaient endurer il m’a semblé nécessaire de les faire accompagner par Walt, un chien secouriste très attachant qui ne se préoccupe que de l’amitié et du soutient qu’il peut apporter. Avec son aspect très pataud, son gros museau, son regard d’enfant, Walt a su conquérir les cœurs. Durant l’aventure, on voit des morts, mais les différents personnages ne tuent jamais, ou alors c’est simplement suggéré (en envoyant une bombe sur un bunker au loin). Dans la mesure où l’on incarne des gens normaux, pourquoi ne pas avoir justement montré cette facette-là de la guerre - des personnes qui n’ont jamais tué, mais qui ont été obligé de le faire durant le conflit ?
C’est un parti pris pour montrer que la guerre ne se fait pas nécessairement derrière un fusil. Les gens y ont été malgré eux et  se sont retrouvés à commettre des actes horribles certes, mais nous avons aussi voulu proposer au joueur un nouveau type d’expérience. Il nous était aussi très important de montrer que nos personnages sont emportés par ce conflit qui bouleverse leur vie. C’est donc un jeu sur la guerre et non un jeu de guerre.

Il y a eu tout un travail effectué sur la musique. Pouvez-vous nous raconter le travail de collaboration avec les nombreux compositeurs qui ont signé la bande originale, et à quel point la musique peut influer sur le gameplay et les émotions que procurent certaines scènes du jeu ?
Les musiques ont été choisies par l’équipe Audio en fonction de leur pertinence vis-à-vis de l’émotion et du gameplay. Des heures de calibrage et de mises en place ont permis d’arriver aux résultats souhaités. Parlons de la version iOS. C’est le premier jeu utilisant l’UbiFramework, et sorti auparavant sur des plateformes plus traditionnelles, à arriver sur iOS. Comment s’est passé le travail d’adaptation notamment au niveau du gameplay ?
Nous avions dès le début cette volonté et l’ambition de proposer notre jeu sur tablette. Le Game Designer Simon Chocquet-Bottani était donc parti avec cette idée de base que nous aurions cette version, et a donc développé le jeu avec cet objectif. Également pour les graphismes, nous avons pu profiter de la finesse de l’écran Retina. Cette dernière question est inévitable : désormais sur iOS, Soldats Inconnus peut-il arriver sur Android et PlayStation Vita ?
Le jeu est uniquement disponible sur iPhone, iPad et iPod Touch ! Je n’ai pas d’information supplémentaire concernant les autres plateformes.